Escapade
« … écrire un essai sur les choses qui ne se produisent pas, sur les vies non vécues, les guerres qui n’ont pas été livrées, sur ce monde d’ombre qui s’étend parallèlement au monde que nous prenons pour le monde réel, le non-dit et le non-fait, le non-remémoré »
Paul Auster – Sunset Park
C’est en regardant les autres se battre pour une miette d’authenticité qu’elle décida de s’éclipser. Elle opta pour l’inaccessibilité des objets. La fuite comme mode de confrontation.
… … …
Ce sont de pâles voix égarées dans une mélancolie nostalgique qui sont ses acouphènes. R. sourit. R. sourit toujours. Ses yeux vous écoutent. La réponse est feutrée, écho des fantômes qui l’accompagnent.
La douceur de R.
A neuf heures trente, c’était encore un peu l’été, elle déposa son habit d’incertitudes dans le vacarme pourpre de ses pesanteurs. Il ne lui restait plus qu’à …
Elle sourit.
Quand R. fermait les yeux elle aimait la vie en bicolore. Couleurs complémentaires.
Alors Il apparaissait. Lui. Perçant le brouillard bleu de ses attentes. Il apparaissait flash orange de ses désirs, accablé par le poids de ses fantasmes.
Purple night
Les draps frémissant sous la lune
R. repoussa mollement le chaos qui traversait sa vie bien habillée.
Les démons flirtaient avec sa gourmandise réanimée
Elle se montrait - à peine voilée d’une toute nouvelle fragilité.
Elle fit de ses doutes un argument artistique qu’elle déposa sur le bord du chemin.
Elle les reprendrait au retour. Elle les aimait bien, ses doutes, mais aujourd’hui ils devenaient gênants.
Volutes du désir
Le lent ravissement de R.
Un soupçon de soufre déposé en ses rêves
Et les pieds s’enflamment
Le couple a plané au dessus de l’automne
R. tenait le registre de ses dispersions
Combinaison de troubles et de fulgurances
Le couple s’est posé à la cime d’un séquoia
Géant. Géant comme leur amour
Elle n’avait pas le vertige
Juste l’ivresse de n’être pas à sa place
Le soleil a rampé péniblement sur la canopée d’une forêt frileuse
La rosée s’est évaporée.
Ce matin, le héron solitaire.
R. se réveille
Ses obsessions bien calfeutrées dans une besace ocre
Lui ne doute pas
Ni dans son sommeil
Elle le laissera s’effacer sur le chemin
Celui qui ne mène pas
R. en avait fini.
Au jeu des dominos elle ne le suivra pas
Se couvrir. S’alléger
Elle se protègera du froid
Il existe au moins vingt-trois raisons de ne pas passer de l’autre côté de l’horizon.
Mais il y a cette lumière.
Là-bas.
Et si elle restait…
Elle creuserait dans la noirceur de ses cauchemars l’énergie pour sortir des gènes maternels.
Crime pour soulagement. Avec circonstances atténuantes : crazy glue
Elle déléguerait à ses cellules étourdies le soin d’organiser un départ définitif. Manque de globules rouges. La transparence des sentiments. Le crabe qui ronge. Pas de déplacements. Seuls les mots lui serviraient de béquille. La fuite dans les mots.